L’excitation des fêtes.

« Tu as tous les cadeaux ? On est bon ?  »

J’en ai oublié que l’avant veille j’ai craché du sang dans la baignoire. Là je suis passée à autre chose, il faut faire la valise, ne pas oublier la brosse à dents, la pilule, le ménage dans l’appartement pour revenir et que ce soit tout beau tout propre, sortir la bouteille et les Ferrerro Rocher et ne pas oublier les robes de soirée…

22 décembre –

Samedi matin, 7h40, je tousse un peu, je crache encore un peu de sang, bon on verra ça plus tard, là faut y aller, je prendrai un rendez-vous chez le médecin en arrivant chez mes parents.

On prend vite fait un petit café et après un brin de toilette, c’est parti pour les vacances ! Le GPS nous indique 7h de route. On écoute France Inter, les infos, un peu de musique. J’attendais ce moment là avec tellement d’impatience… Ça fait 6 mois que je ne suis pas revenue chez mes parents, là enfin une semaine de vacances en famille. J’adore ! En plus papa est né le 23 décembre, chez nous, Noël, ça dure toute la semaine.

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Le trajet se passe plutôt bien. Je tousse un peu. J’ai l’habitude de tousser, avec un rhume ou une bronchite. Ah oui tiens, une bronchite c’est sûrement ça, en plus j’ai lu que parfois on pouvait cracher du sang quand on a des bronchites ! On est sur la route, ça roule bien, on ne paye pas le péage avec les Gilets jaunes. Je fatigue un peu et j’ai mal aux côtes.

On a faim. Petite pause midi dans un routier. On mange bien. Mais j’ai mal quand même non ? On appelle mes parents pour les prévenir qu’on va arriver plus tôt que prévu. 3 heures d’avance, on s’est levés tôt, on est trop motivés, on est trop forts ! On digère tranquillement, je conduis et en leur parlant je me sens pas bien, il faut vraiment que je prenne rendez-vous chez le médecin, ça va pas. D’habitude je peux attendre, mais oui je peux attendre ! Mais ma sœur et ma mère me prennent un rendez-vous le soir même, 23h45, chez SOS Médecins ( on est le 22 décembre, aucun rendez-vous n’est dispo avant le 24 décembre chez les autres médecins) autant être fixé le 22 !

On arrive à la maison, c’est trop cool ! Tout le monde est là, les vacances vont être au top. Je ne demande rien de plus que de nous retrouver tous ensemble. On mange bien, raclette bien sûr, on boit un petit peu mais pas trop, faut prendre le volant pour aller au rendez-vous.

Allez on y va ! J’ai l’impression qu’on me plante un couteau dans les côtes, c’est fou, je n’avais jamais ressenti ça !

Le médecin est là, il a pas l’air commode. Je l’ennuie visiblement, mais bon c’est lui qui m’a donné cet horaire… Je lui explique mes maux, le sang, la fatigue. Je n’ai pas de fièvre et pas les jambes gonflées.


Il m’installe.

« Bon, j’avais rangé l’électrocardiogramme, mais on va vous en faire un… pour mettre de côté les  embolies, phlébites… pff »

N’hésitez pas à le dire si je dérange…

« ok »

« Ne bougez pas », il sort sa machine, une espèce de soutien-gorge en latex qu’il pose sur ma poitrine et attache à mes bras.

« Ne bougez pas, oh vous avez bougé, faut que je recommence… »

Ça fait toujours plaisir d’être si bien accueillie !

« Pardon »

« Bon tout est normal, je ne vois pas de soucis, pas de fièvre, 37,4, bonne tension, ah si vous êtes à la limite de la tachycardie 120, faut faire du sport mademoiselle ! »

Prends ça avec le sourire !

« ok, mais du coup qu’est ce que c’est ? »

« Vous toussez ? Ça a commencé quand ? »

« Jeudi »

« On est samedi, bon ça doit-être une douleur intercostale, là en bas de vos côtes une petite déchirure qui vous fait mal, je vous prescris des dolipranes et un anti toussif, et au cas où, lundi, allez faire une prise de sang pour être sûre que tout va bien »

« ok »

« 80 euros »

« Ah oui ! »

« Ben, oui, je vous ai fait un electro, on est samedi et il est minuit… »

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« ok, merci ! »

Je sors de là, rassurée, un peu, fatiguée, beaucoup.

Bon Camille c’est une douleur intercostale. C’est dingue ça, moi qui tousse souvent je ne me suis jamais fait mal et là BIM déchirure pour le peu de fois où j’ai toussé, le corps humain est vraiment pas simple.

23 décembre –

Joyeux anniversaire !!

La journée se passe bien, balade au bord de l’eau, bon repas, balade dans Quimper, on voit les illuminations de Noël. On remonte de la place de la cathédrale au lycée Le Likès, c’est dur, je tousse, j’essaye de maintenir le rythme mais j’ai vraiment l’impression d’avoir 90 ans. Satanée déchirure, tu vas quand même pas me bousiller mes fêtes de Noël ! On rentre à la maison, j’ai le palpitant à fond les ballons, j’essaye de m’allonger mais mince, ça me fait mal ! Dans n’importe quel sens, je ne suis pas à l’aise.

C’est l’anniversaire de Papa ! Tu vas quand même pas gâcher l’anniversaire de Papa !

« T’as mal chérie ? »

« Un peu, je ne vais pas m’asseoir dans le canapé, mais plutôt sur une chaise haute pour ne pas trop sentir la douleur »

La soirée passe. J’adore l’apéro, on se retrouve tous ensemble autour de la table du salon. On picore de bonnes choses que maman a préparé, on joue à des jeux, on discute et on rit encore. Mais ça fait mal de rire en fait ! Avec le verre de champagne j’en oublie que j’ai mal. La fatigue arrive. Je quitte toute la famille au dessert pour aller me coucher.

Dormir, il n’y a que ça pour aller mieux, se reposer, dormir, fermer les yeux, ne plus y penser. Mais pour dormir il faut pouvoir s’allonger… Je n’y arrive plus, ça me fait trop mal, j’ai l’impression que la douleur se déplace dans mes côtes.  Y m’aide à me mettre au lit, avec plein d’oreillers sous la tête. « Demain la pharmacie sera ouverte, tu auras les médicaments et tu feras ta prise de sang ! » Je me répète ça en boucle, ça va aller faut juste attendre 8h, l’ouverture du labo. Sois patiente, il te reste 8h à attendre.

C’est pas possible dans cette position, j’ai l’impression qu’on me tord les côtes, je vais quand même pas réveiller tout le monde, à cause de ces p**** de douleurs intercostales ! Lève-toi ! Marche un peu ! Détend-toi ! Ça va aller ! Aller rallonge-toi, tu vas bien finir par t’endormir.

Les minutes passent…

Les larmes coulent sur mes joues. Merde, j’ai jamais eu si mal, là c’est une vraie grosse douleur qui me paralyse. Je ne trouve aucune position allongée qui ne me fait pas souffrir. Souffrir, un mot que je n’ai jamais employé pour mon corps. À dire vrai je ne connais pas la souffrance. Des idées noires me traversent l’esprit, « je crois vraiment que je peux mourir cette nuit ». Merde, j’y pense vraiment là ?

Le temps m’apprendra que dès la veille j’aurai dû oublier ce que SOS médecins m’a dit et partir directement aux urgences, écouter mon petit ami et ne pas attendre, mais bon….

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7h30 – C’est insupportable je n’en peux plus. J’attends que tout le monde se réveille, je dois rester à jeun pour faire la prise de sang… Maman arrive dans la cuisine et me voit.

« Tant pis pour les analyses, tu les feras aux urgences, on peut pas te laisser comme ça ! »

Y*** s’habille en deux deux, papa aussi et on embarque pour les urgences. Les dos d’ânes, les nids de poule, je les sens bien.

9h – On arrive à l’accueil. Je suis prise en charge très rapidement. Secrétaire médicale qui me prend toutes les infos. Je patiente à l’accueil, je suis séparée de ma famille. Un monsieur en face de moi c’est fait mal à la jambe, il est déjà venu visiblement dans la semaine, il tient sa femme au courant par téléphone.

Madame ?

9h36 – admission aux urgences

Je me lève, je suis reçue par une infirmière, elle regarde la prescription de SOS médecins. Je fonds en larmes. L’angoisse, la douleur, je ne sais plus trop, mais je suis contente d’être là.

« Une douleur intercostale, c’est vrai que ça peut faire mal ! Bon on va voir !  »

Elle prend ma tension, me rassure. Elle s’étonne que le médecin d’SOS ne m’ai pas donné le résultat de l’électrocardiogramme. J’aime bien sa coupe de cheveux, elle a les cheveux courts bruns et de jolies boucles d’oreille. Elle m’emmène dans un box.

« Essayez de vous détendre, vous pouvez vous allonger ? »

« Non, mais je veux bien si besoin »

« Vous avez pris quelque chose pour la douleur ? »

« Non, comme je devais être à jeun, je n’ai pas osé… »

« Je vous ramène ça, le médecin ne va pas tarder »

Le médecin arrive, Mickael, interne. Très sympathique, le visage un peu rond, grand, de grosses lunettes double foyers qui donnent un vrai côté rassurant.

Il m’écoute, le sang dans les crachas, le mal dans la poitrine, une douleur comme un poignard en haut à gauche et en bas des côtes.

« La douleur remonte vers l’épaule ? »

Il me croit !

« Oui »

 » Les mollets ne font pas mal ? Ils ne sont pas gonflés. Je veux supprimer les urgences, du coup on va faire des tests pour écarter l’embolie pulmonaire, le….(et d’autres choses dont j’ai oublié le nom), vous prenez quelle pilule ? »

« Opti quelque chose je ne me souviens plus », ma gynéco m’a changé de pilule il y a 6 mois, avant c’était Leeloo Gé, mais là c’est autre chose et le nom ne rentre pas…

« Optidril peut-être ? »

« Je ne saurai vous dire »

« Bon, on va faire l’électrocardiogramme puis les prises de sang, ok ça va aller, on va trouver »

« Merci beaucoup »

J’attends. Le box, c’est une chambre individuelle, jaune et bleue avec un lit, un ordinateur. J’entends les infirmières discuter. L’une d’entre elle a eu un accident de voiture la veille et ça va lui coûter une blinde, pendant ce temps une autre court, pour réorganiser les box, ça va ce matin il n’y a pas trop de monde, ils espèrent que ça va rester comme ça.

L’infirmière revient. Quelle est douce ! Elle fait tout pour me mettre à l’aise sur le brancard elle a bien vu que je ne peux pas rester allongée.

« Ces larmes elles sont pour quoi ? »

« La douleur et l’angoisse je pense, mais ça va je vous remercie »

Elle m’installe les cathéters. Une prise de sang dans la veine une autre dans l’artère. Elle me prévient, chercher l’artère ça fait toujours mal car on ne trouve pas de suite.

Tu parles, je sens presque rien tellement on cogne sur mes côtes gauche. Je ne me suis jamais faite tabassée mais je pense que la douleur est à peu près similaire. La prise de sang est terminée, l’électro aussi. On attend de voir ce que ça donne.

Elle me ramène ma famille dans la chambre. Bon ça va mieux je crois ! Je suis soulagée d’être prise en main et par des gens bienveillants en plus ! Y** m’a pris un pain au chocolat, je me jette dessus. On rigole. Les prises de sang donneront des résultats dans 1h30 au plus tôt. Je reste assise sur le brancard, je n’arrive toujours pas à m’allonger. Le temps passe assez vite.

Toc toc –

« Excusez-nous madame , on va devoir libérer la chambre, un car de malades vient de débarquer aux urgences, je vais devoir vous faire patienter dans le couloir »

Un car de malades, ça m’a frappée…

Je dis au-revoir et me retrouve à attendre dans le couloir. Je vois le personnel soignant courir partout, beaucoup de personnes âgées se sont fait mal, ont glissées, sont tombées. Une dame un peu alcoolisée se fait gronder car elle est partie fumer dans les toilettes des urgences, juste à côté de moi.

J’attends…

Mickael arrive.

« Bon j’ai eu les résultats de l’électrocardiogramme, tout va bien, vous êtes à 110, c’est régulier… Par contre dans vos analyses de sang, je m’interroge sur le taux élevé de D-Dimeres… »

Je n’ai pas eu la rapidité d’esprit de demander ce que c’est mais je vois à son regard que c’est important…

« Du coup, je vais vous faire passer une radio des poumons pour écarter définitivement tout risque d’embolie »

« Ok »

Ok, je suis toute seule dans le couloir, j’ai mon téléphone, je vois plein de patients qui sont envoyés vers la radio, pas très loin on a la salle de déchoquage. ça rentre ça sort. On me donne un tramadol. Wouawwww la douleur s’estompe un peu et j’ai l’impression de planer.

13h30 – On amène mon brancard dans la salle de radiologie.

Je suis avec un homme qui dort profondément et une dame âgée qui semble s’être cassée la hanche et souffrir beaucoup. Une enfant ayant de petites lunettes et des béquilles me regarde, intriguée, par terre. Elle rentre dans la salle pour la radio. Elle s’est cassée une jambe, mais semble avoir l’habitude… Je lui souris. Elle tire la tronche. Bon…

Le temps passe, arrive enfin mon tour. Une gentille dame m’emmène vers la grosse machine : La radio. J’ai l’impression d’être dans un laboratoire secret de Doctor House. Une machine avec un grand bras en plastique pliant se remet à sa place. Je dois m’installer droite devant un bloc, et maintenir ma respiration.

« C’est fait, je vous donne ça si vous souhaitez aller voir la radio sur internet, je vous ramène à votre place »

C’est rapide. La dame me ramène dans le couloir, en face de la salle de déchoquage. Juste en dessous d’un bloc électrique qui grésille.

Je suis assise sur le brancard, je n’ai toujours pas le droit de marcher. Si c’est une embolie, justement, il faut rester allongée pour éviter que le caillot ne remonte.

J’attends.

14h –

Mickael vient me voir.

« On a regardé les résultats avec le radiologue, on voit quelque chose en bas sur votre poumon gauche, je vais réécouter pour voir si je vois quelque chose… » Il m’ausculte. Il écoute ma respiration encore et encore.

« Bon, ça me semble bien »

Il est embêté.

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« Je suis interne, je vais faire venir une senior pour voir si on fait ou pas un scanner. Car si non vous pourrez rentrer chez vous… Je reviens »

« Ok »

Ok bon, le fait est que je veux qu’ils trouvent, je ne vais pas partir d’ici sans qu’ils sachent ce que c’est.

Un enfant pleure dans un box à côté de moi. Il est venu avec sa mère et est tombé dans la baignoire. Ils sont 5 soignants avec lui pour essayer de le recoudre mais il ne veut pas prendre les antidouleurs, ça crie, mais l’équipe médicale garde son calme.

Mickael revient avec une dame.

« Madame voici le Dr… c’est la Sénior des urgences. »

« Bonjour »

« Bonjour, alors Mickael m’a expliqué, vous avez des douleurs thoraciques, et craché un peu de sang ? Vous n’avez pas les jambes lourdes ou gonflées. Rappelez-moi ce qui s’est passé ? »

Je lui raconte à nouveau tout en essayant de ne pas perdre le fil.

Elle me regarde, elle regarde Mickael. Elle lève les yeux un peu au ciel.

« Et t’as fais une radio des poumons ?! »

Elle le regarde un peu avec mépris, l’air de dire, on va encore nous engueuler car on a fait des radios qui nous coutent de l’argent et qui ne servent à rien.

« Bon, et vous avez mal plutôt ici ? »

« Non plutôt là »

« Là ? » Elle appuie fort sur une côte. Je crie.

« Oui mais c’est vraiment douloureux ! »

« Bon ça sert à rien que je continue à vous faire souffrir, je pense que le diagnostic de SOS médecin est bon. Vous toussez et vous avez dû vous faire une déchirure en toussant. Je vois pas autre chose, on va pouvoir vous laisser »

« Vraiment vous pensez que c’est ça ? J’ai tellement mal et j’ai l’habitude de tousser ! Mais jamais je ne me suis fait ça, et en plus j’ai l’impression que la douleur se déplace »

L’enfant du box adjacent crie à nouveau.

La sénior parle avec les soignants.

« Je reviens je vais les aider »

Mickael et la Sénior partent voir le gamin, je suis laissée là au milieu du couloir, sans savoir ce qu’il se passe. En plus j’ai pas envie de les embêter…

Bon je vais devoir accepter ça, une déchirure intercostale tout simplement, je serai vite rentrée à la maison.

20 minutes plus tard Mickael revient.

« Bon j’ai vu avec le Docteur… et on va vous faire un scanner, pour mettre de côté toute embolie pulmonaire et être rassuré »

Alléluia ! Merci merci merci !!

« Merci beaucoup ».

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15h –

On vient me chercher dans le couloir et on m’emmène vers la salle du scanner. Le brancardier part et me laisse sur mon brancard. La dame me dit de me mettre sur la table pour passer le scanner. Personne ne m’aide. J’essaye difficilement de me tracter sur la table, mais avec mon bras gauche. La douleur. B** de m*** ça me fait un mal de chien.

J’arrive à me positionner tant bien que mal, assise sur la table.

« Allongez-vous, nous allons vous mettre un liquide dans le sang et vous aurez la sensation d’avoir chaud, voire de vous faire pipi dessus »

« Ok, mais est-ce que je peux rester assise? »

« Non, faut être étendue »

« C’est vraiment douloureux… »

« On ne peut pas faire autrement, je vous mets une cale sous les jambes, mais faut s’allonger, de toute façon ça ne dure que 5 minutes »

Que 5 minutes, mais elle se rend compte de ce qu’elle dit ? 5 minutes, je peux déjà pas m’allonger dix secondes alors 5 minutes !!!

Bon ça commence.

Retiens tes larmes Camille, tu ne vas pas flancher, on tient encore un peu, le temps du scanner ! Allez du nerf !

Mon corps s’engouffre dans cette grande bouche. Puis la machine se met en marche et tourne autour de moi. Le liquide pénètre dans mon corps, et effectivement, j’ai la sensation de me faire dessus. Aie aie aie.

Regarde quelque chose, focalise-toi dessus, il manquerait plus que de faire une crise de claustrophobie. Bon j’en peux plus je veux sortir.

« Ça va Madame ? »

« Non ça va pas, j’ai vraiment très mal »

« Bon c’est fini »

Le scanner se termine, je suis épuisée. J’ai l’impression qu’on m’a torturé et que je ne suis qu’un chiffre sur une longue liste. Je dois me remettre seule sur mon brancard. On me parque dans la salle d’attente à côté d’une dame, le brancardier ne va pas tarder.

Je fonds en larmes.

Camille, reprends-toi quand même, pas ici, pas devant tout le monde ! Mais c’est plus fort que moi. Je suis épuisée et j’ai trop mal. Je reste assise.

Le brancardier arrive, il me voit. Il me remet dans le couloir et croise mon infirmière du matin et lui dit « On a une douloureuse !  »

Elle vient me voir et part prévenir le médecin.

Mickael arrive, il vient de recevoir le scanner, les spécialistes l’analysent je devrai avoir les résultats très vite. Je dois attendre le résultat avant d’avoir un autre antidouleur.

L’infirmière me repositionne sur le lit, droite. Y** et papa sont toujours dans la salle d’attente. On s’envoie des textos.

Mickael arrive. Derrière ses grosses lunettes et sa chemise blanche je vois toute sa gentillesse à mon égard et aussi un petit sourire de fierté.

« Bon, le scanner nous indique qu’il y a bien une embolie pulmonaire sur le poumon gauche »

TEMPS – Je le regarde.

J’ai 28 ans je viens de faire une embolie pulmonaire.

Je ne réalise pas forcément tout de suite mais je le vois soulagé, ça me soulage du coup. Et puis il a trouvé ! Il a trouvé ce que j’avais, je vais pouvoir être soignée et rentrer chez moi.

« Merci beaucoup !  »

« On va commencer de suite avec les médicaments, … »

Il me dit plein de choses mais je n’écoute rien.

« Je suis d’accord avec tout ce que vous dîtes, mais si vous pouvez me l’écrire ça m’arrange »

Il repart, j’ai envie de lui faire un câlin pour le remercier.

Pendant ce temps là, l’infirmière est partie chercher Y** et mon père. Ils arrivent je leur annonce. On savait que c’était ça, sans le dire, j’avais tous les symptômes ou presque. Je suis plutôt forte à la douleur et là c’était tellement insupportable… Une déchirure musculaire… Maintenant des larmes de soulagement et de peur un peu aussi. S’il n’avait pas persisté…

Autant vous dire que Mickael est devenu le héros de la journée. Il a tenu tête il est allé jusqu’au bout de sa pensée et a trouvé ce que j’avais, malgré les avis contraires. Après ça j’ai eu tout le soutien du monde de ma famille, qui a attendu avec moi jusqu’à 22h30 pour sortir de l’hôpital, le temps de faire quelques selfies « embolie ». Mon chéri à couru partout pour avoir mon ordonnance et les médicaments le soir-même.

Je retiens surtout Mickael, l’infirmière aux cheveux courts et une autre infirmière qui ont été à mon écoute dès le début. D’ailleurs papa leur a offert un petit cadeau de Noël qui a bien fait plaisir. Des équipes médicales comme ça, ça n’a pas de prix !

Tout le monde n’était pas à mon écoute. Je sais qu’il doit être difficile de faire la part des choses entre les différents malades, ceux qui disent vrai, ceux qui en rajoutent, ceux qui veulent à tous prix être malades pour qu’on s’occupe d’eux.

Moi j’avais juste besoin que quelqu’un m’écoute vraiment, car si je repartais à 14h30 avec ma « déchirure intercostale » qui sait où je serais…


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Un évènement comme celui-là ça soude à jamais et ça change aussi finalement. Pour la première fois de ma vie je me suis vue mourir en vrai. J’ai vécu cette panique intérieure de trop peu, du manque de temps. J’ai vraiment cru qu’ils n’allaient pas trouver ce que j’avais, j’ai cru qu’on ne me croyait pas.

Pour moi Mickael, derrière ses lunettes rondes à doubles foyers (peut-être que ce n’est pas le cas mais c’est comme ça que je  l’ai perçu), est devenu mon héros. Il est et sera surement le héros de quelques autres aussi, mais c’est le mien.

Maintenant tout va mieux.

Alors, maintenant que j’ai fait les tests on m’a bien dit que c’était les conséquences de ma pilule, j’en suis donc interdite à vie. On va creuser plus loin, car on m’a aussi trouvé la mutation de facteur V leiden. Vous pouvez dores et déjà regarder ce que fait l’association AVEP . On n’en parle pas assez, mais c’est un facteur à risque, beaucoup de femmes ont des problèmes cardiaques ou pulmonaires à cause de la pilule, alors que nous prenons ça quotidiennement sans nous rendre compte de ce que nous faisons subir à notre corps tous les jours.

Ces derniers jours beaucoup de sentiments se sont mélangés dans ma tête, de la colère d’abord avec SOS médecin, de la peur car j’ai cru un instant que je pouvais y passer, de la tristesse car je ne voulais pas faire ça pendant les vacances de Noel, mais aussi de la joie. Oui de la joie, car finalement j’étais entourée de ma famille de sang et de coeur, et maintenant les liens sont encore plus forts que jamais.

Alors finalement quoi de plus beau comme cadeau de Noël que d’être ensemble et de se redire encore une fois que l’on s’aime?

Alors rebaptisons la : l’embellie de Noël !

♥️

Camille